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La Question Technique 9 : DVI, HDMI, DisplayPort, quelles différences ?

Cette semaine dans La Question Technique, il est question de connectiques d’affichage, sorte de marasme englué dans un nombre incalculable de normes et de versions. Essayons d’y voir un peu plus clair…

Après que le VGA a dominé les interfaces pour écrans informatiques pendant plus d’une décennie, l’arrivée des écrans numériques a motivé le passage à de nouvelles interfaces, numériques elles aussi. En effet, si une interface analogique pouvait avoir du sens avec un écran analogique (une conversion numérique vers analogique était de toute façon nécessaire), elle n’est pas optimale avec un écran numérique, puisqu’on a alors une double conversion : le RAMDAC de la carte graphique produit un signal analogique à partir des données numériques calculées par le GPU, puis le circuit vidéo de l’écran numérise ce signal pour piloter l’écran…

Mais comme trop souvent, le passage au numérique s’est accompagné de multiples normes, défendues par différents groupes, ce qui mène à ce genre de choses :

De quoi regretter la simplicité de ce bon vieux VGA… Mais en pratique, quelles sont les différences entre ces différentes normes ?

Le DVI

Première interface numérique externe pour les écrans d’ordinateurs, le DVI (Digital Visual Interface) a été introduit en 1999 et reste encore largement utilisé aujourd’hui. Un canal DVI utilise trois liens série, un pour chaque couleur. Le signal y est encodé en TMDS (Transition-minimized differential signaling), un encodage qui code chaque octet sur un symbole de 10 bits en cherchant à minimiser le nombre de changements de valeur du signal et à équilibrer le nombre de 0 et de 1. En fonction des besoins (définition de l’image et fréquence de rafraichissement), la fréquence de fonctionnement peut être modulée entre 25 et 165 MHz. La bande passante ainsi disponible (3.96 Gbit/s) permet une définition maximale de 1920×1200 à 60 Hz avec des couleurs 24 bits (en incluant les blanking, des périodes sans signal à la fin de chaque ligne et de chaque frame, ce mode nécessite 154 MHz, toutes les définitions « standard » supérieures nécessiteraient plus de 165 MHz à 60 Hz).

En plus des trois liens TMDS, le DVI dispose, comme le VGA, d’un lien DDC, qui permet d’échanger des informations non vidéo avec l’écran (identification de l’écran et des modes d’affichage qu’il supporte, contrôle de certains réglages).

Le connecteur DVI existe pour sa part en six versions différentes (hors versions propriétaires utilisées par certains constructeurs), selon les fonctionnalités disponibles. Le plus courant aujourd’hui est le DVI-I Dual Link, qui propose deux canaux DVI (le second canal permet de supporter des définitions plus élevées ou d’encoder les couleurs sur plus de 24 bits par pixel) et permet également de véhiculer un signal VGA (permettant donc de connecter un écran VGA via un adaptateur passif). Le DVI-I Single Link offre un seul canal DVI et la compatibilité VGA, les DVI-D Single Link/Dual Link proposent uniquement un ou deux canaux DVI, sans compatibilité VGA.

Les deux autres connecteurs sont beaucoup plus rares. Le DVI-M1-DA est un connecteur plus large, supportant le VGA, le DVI Dual Link, mais aussi l’USB et le DVI-A est un extra-terrestre dont on se demande bien ce qu’il fait dans une norme de connectique numérique : il ne permet que de faire passer un signal analogique VGA…

À l’exception du DVI-M1-DA, tous les connecteurs DVI ont le même format, et se distinguent simplement par l’absence ou la présence de certains contacts, ce qui permet d’éviter des adaptateurs : un câble doté de l’un quelconque des connecteurs mâle pourra se connecter à n’importe quel connecteur femelle supportant toutes les fonctionnalités supportées par le connecteur mâle. Un câble DVI-D pourra par exemple être connecté sur un port DVI-I, mais pas sur un port DVI-A.

Le HDMI

Destiné en premier lieu à remplacer les interfaces analogiques des TV et platines vidéo de salon, le HDMI (High-Definition Multimedia Interface) est arrivé au début des années 2000.

Comme le DVI, il utilise trois liens TMDS, ce qui permet aux deux interfaces d’être compatibles entre elles, en utilisant simplement un adaptateur passif. Le HDMI apporte par contre de nouvelles fonctionnalités et abandonne la rétrocompatibilité VGA.
Le plus gros apport de l’HDMI est sa capacité à transporter des flux audio (jusqu’à 8 canaux 192kHz 24 bits non compressés) en plus du flux vidéo, ce qui est indispensable pour une connectique destinée aux TV. Les données audio sont transmises via les mêmes liens TMDS que les flux vidéo. Pour ce faire, la connexion ne fonctionne plus en mode flux mais en mode paquet, en alternant des paquets vidéo et des paquets audio. Ces derniers sont transmis durant les phases de blanking du signal vidéo, avec la possibilité d’envoyer jusqu’à 4 032 bits (18 paquets de 224 bits) de données audio lors de chaque blanking.

En plus des données audio et vidéo, le HDMI introduit également le protocole CEC (Consumer Electronics Control), qui permet le pilotage des appareils via la connectique HDMI, permettant ainsi à l’utilisateur de ne manipuler qu’une seule télécommande.
La norme prévoit cinq connecteurs différents :

• Le Type A, qui est le plus répandu, qui intègre un canal HDMI (équivalent au DVI-D Single Link)
• Le Type B, quasiment inexistant, qui propose deux canaux HDMI (équivalent au DVI-D Single Link)
• Le Type C (Mini) et le Type D (Micro) qui offrent les mêmes fonctionnalités que le Type A, mais dans un format plus compact. On le trouve principalement sur des tablettes et des smartphones.
• Le Type E, qui intègre un mécanisme de maintien et une protection contre l’humidité, pour supporter les contraintes liés à une utilisation dans le secteur automobile.
Depuis sa spécification originale, qui date de 2002, le HDMI a connu cinq versions majeures.

HDMI 1.1 et 1.2

Ces deux premières évolutions sont essentiellement logicielles, en apportant le support de nouveaux formats d’encodage pour les flux audio.

HDMI 1.3

Avec le HDMI 1.3, introduit en 2006, le HDMI s’est affranchi de sa limite de définition (1920×1200 à 60 Hz/24 bits pour du single link) en poussant la fréquence maximale de fonctionnement jusqu’à 340 MHz. Le single link offre ainsi un peu plus de bande passante que le dual link des anciennes versions et du DVI (8.16 Gbit/s contre 7.92), ce qui permet le support des couleurs jusqu’à 48 bits et la montée en définition (2560×1600 à 75 Hz/24 bits).

HDMI 1.4

Conservant la même bande passante que le HDMI 1.3, le HDMI 1.4 (2009) apporte le support logiciel de nouvelles définitions (notamment le 4096×2160 à 30 Hz) et de la 3D.
Il propose également deux nouveaux canaux de données (sans changement de connectique, ces canaux réutilisent des contacts existants). Le premier est le canal HEC (HDMI Ethernet Channel) à 100 Mbit/s qui permet à un appareil HDMI de partager sa connexion réseau avec un autre, tandis que le second est le canal ARC (Audio Return Channel), qui sert à transmettre un flux audio dans le sens inverse de la liaison HDMI.

L’intérêt de ce canal audio est notamment de simplifier la connexion lorsqu’un amplificateur externe est utilisé pour la gestion du son. Dans ce cas, on connecte généralement les différentes sources HDMI à l’amplificateur, qui est lui-même raccordé à la TV en HDMI. Mais si on veut utiliser le tuner ou le lecteur multimédia de la TV, il faut alors aussi un câble audio de la TV vers l’amplificateur pour lui renvoyer le son de la TV. L’ARC permet de remplacer ce câble. Il pourrait également servir pour de nouveaux usages, comme par exemple l’utilisation de commandes vocales pour contrôler les équipements hi-fi.

HDMI 2.0

Évolution la plus récente du HDMI (2013), la version 2.0 augmente la fréquence jusqu’à 600 MHz, soit une bande passante de 14.4 Gbit/s, suffisante pour supporter le 4096×2160 à 60 Hz ou en 3D (2x30Hz). Les données vidéo peuvent de plus être séparées en deux flux, ce qui permet de piloter deux écrans via un seul port HDMI. La bande passante disponible pour l’audio est également revue à la hausse, permettant jusqu’à 32 canaux audio et une fréquence d’échantillonnage allant jusqu’à 1536 kHz.

Le DisplayPort

Avoir une interface unique commune au monde de l’informatique et à celui de la vidéo, avec le HDMI, aurait été trop simple. Les principaux acteurs du monde informatique, réunis sous la bannière du VESA, ont donc mis au point en 2006 une nouvelle interface (utilisable sans payer de licence, contrairement au HDMI), destinée à succéder au DVI, mais aussi au Flat Panel Display Link (l’interface interne utilisée dans la plupart des écrans, y compris les ordinateurs portables, pour connecter le circuit vidéo à la dalle), et dont les caractéristiques font qu’il pourrait aussi remplacer le HDMI… si le monde de la vidéo voulait bien l’adopter…

Le DP s’appuie sur un protocole en mode paquet, avec une transmission série et en encodage des octets avec des symboles de 10 bits (l’encodage n’est toutefois pas le même qu’en DVI/HDMI…). Un port DP peut utiliser 1, 2 ou 4 lignes de transmission fonctionnant à 162 MHz ou 270 MHz, soit un débit utile de 8.64 Gbit/s, équivalent à celui d’une liaison HDMI 1.3 ou DVI Dual Link. Comme en HDMI, cette bande passante peut être utilisée pour transmettre des paquets vidéo ou des paquets audio (jusqu’à 8 canaux 192 kHz/24 bits).

En plus des quatre lignes de transmission, le DisplayPort intègre un canal auxiliaire bidirectionnel (half-duplex) à 1 Mbit/s.

Il n’existe actuellement que deux connecteurs DisplayPort, le connecteur classique et le connecteur Mini conçu par Apple puis intégré à la norme, mais un connecteur Micro est sur les rails.

DisplayPort 1.1

Première évolution du DisplayPort, la version 1.1 est une évolution mineure, qui a principalement apporté le support du HDCP, en complément du DPCP, plus sécurisé, qui était proposé avec le DP 1.0.

DisplayPort 1.2

Lancé en 2009, le DisplayPort 1.2 revoit la fréquence de fonctionnement à la hausse (540 MHz), pour une bande passante de 17.28 Gbit/s, la plus élevée disponible actuellement sur les interfaces vidéo grand public. De même, le canal auxiliaire voit sa bande passante exploser, puisqu’elle passe à 720 Mbit/s, ce qui permet de l’utiliser par exemple pour véhiculer de l’USB 2.0.

Le DP 1.2 permet aussi la séparation du flux vidéo pour piloter plusieurs écrans en les connectant en chaîne ou via un hub.

Les extensions du DP

La volonté de VESA de faire du DP une connectique la plus universelle possible a conduit, en plus des versions successives de la norme, à la conception d’un grand nombre de variantes sous forme d’extensions de celle-ci, destinées à des usages spécifique ou implémentant des fonctionnalités optionnelles.

Parmi elles, on notera principalement :

Le MHL

L’interface Mobile High-definition Link est destinée, comme son nom l’indique, aux appareils mobiles et est aujourd’hui la connectique la plus répandue dans ce domaine, avec plus de 500 millions d’appareils compatibles selon les promoteurs de la norme.
Elle a été conçue pour s’accommoder d’un connecteur compact : seuls cinq contacts sont nécessaires (deux pour les données, un pour le contrôle, un pour l’alimentation et un pour la masse). L’alimentation (4.5W) se fait vers la source vidéo, ce qui permet de recharger un appareil mobile lorsqu’il est branché à un écran.

La ligne de données utilise un encodage TMDS, comme le HDMI et le DVI, mais comme il n’y a qu’une ligne, les trois canaux d’un pixel sont transmis successivement, et non plus en parallèle. Le protocole fonctionne en mode paquet, pour pouvoir transmettre de la vidéo, de l’audio ou d’autres types de données (jusqu’à 1 Mbit/s), avec un débit de 1.8 Gbit/s, permettant de faire passer un signal 720p à 60 Hz/24 bits.

La norme ne définit pas de connecteur particulier, mais le plus souvent c’est le connecteur micro-USB 2.0 qui est utilisé, soit en commutant les 5 contacts de l’USB vers le MHL en fonction de ce qui est branché sur le port, soit en ajoutant des contacts supplémentaires pour permettre au MHL et à l’USB de fonctionner en simultané.

Avec la version 2.0 du MHL, le débit passe à 2.4 Gbit/s et un nouveau mode permet d’encoder les pixels sur seulement 16 bits, ce qui autorise à passer en 1080p.
La version 3.0, qui vient d’être présentée, atteint pour sa part 6 Gbit/s, de quoi faire passer un signal 3840×2160 à 30 Hz/24 bits et autorise une puissance d’alimentation de 10W.

L’avenir

Dans les années à venir, on ne devrait pas voir arriver de nouvelles normes, mais de nouvelles versions des normes existantes sont par contre déjà prévues. Le VGA devrait pour sa part continuer à disparaître progressivement, et le DVI pourrait rapidement lui emboîter le pas.

À plus long terme, ce sont les interfaces sans-fil qui devraient monter en puissance. Il en existe déjà plusieurs versions concurrentes (Miracast, WiDi, AirPlay…), mais elles souffrent encore toutes d’un même défaut : la faible bande passante disponible oblige à transmettre un signal compressé avec pertes. Ce n’est pas un problème pour des flux animés (films, jeux…), où les artefacts de compression sont plus difficiles à percevoir, mais ce défaut limite fortement le potentiel de ces interfaces pour un usage bureautique. Les progrès sur les transmissions sans-fil devraient toutefois petit à petit effacer ce problème, et il n’y aura alors plus qu’à espérer une norme de transmission unique utilisée par tous les constructeurs d’écrans et d’appareils sources…

Article publié initialement sur PCWorld