La Question Technique 6 : CD, DVD, Blu-ray, RW… comment ça marche les supports optiques ?

La Question Technique 6 : CD, DVD, Blu-ray, RW… comment ça marche les supports optiques ?

Vous vous êtes déjà demandé comment la musique d’un artiste est stockée sur un CD ? Comment il a été possible de booster d’autant la capacité de stockage sur Blu-ray alors que la galette fait toujours 12 cm de diamètre ? Et comment ça marche l’effacement d’un DVD réinscriptible ? Ça tombe bien, c’est le thème de « La Question Technique » pour cette semaine…

Commercialisé depuis un peu plus de 30 ans (fin 1982), le disque optique est aujourd’hui en perte de vitesse, mais il a tout de même de beaux restes qui vont probablement lui permettre de subsister longtemps sur certaines niches de marché, notamment comme support de sauvegarde en entreprises. Mais au fait, savez-vous comment fonctionnent les disques optiques ?

Le CD

Principes de base

Premier représentant des disques optiques, le CD est constitué d’une galette de plastique sur laquelle sont déposés une couche réfléchissante (aluminium ou or), un vernis protecteur et éventuellement une couche de « décoration ».

Les données y sont représentées grâce à des petits trous disposés le long d’une spirale serrée (1,6 µm d’espacement entre deux tours sur un CD de 74 min, 1,5 µm sur un CD de 80 min, l’espacement minimal permis par la norme) sur la surface supérieure de la couche de plastique. Ces trous ont une largeur de 600 nm et une longueur qui peut aller de 800 nm à 3500nm.

Pour la lecture, un laser d’une longueur d’onde de 780 nm (rouge) est focalisé sur la piste via une lentille et est réfléchi par la couche métallique. Selon qu’il rencontre un trou ou non, la lumière réfléchit interfère plus ou moins avec la lumière d’origine, modulant ainsi l’intensité lumineuse mesurée par un détecteur. Chaque changement d’intensité (passage d’un trou à une bosse ou d’une bosse à un trou) correspond à un 1, tandis que l’absence de changement d’intensité correspond à un 0.

L'encodage EFMLes données sont encodées de manière à garantir que les changements ne soient ni trop fréquents, ni trop rares : chaque séquence de 8 bits est encodée sur 14 bits avec un algorithme garantissant qu’il y a toujours au moins 2 et au plus 10 zéros entre deux 1 (d’où l’existence d’une longueur maximale pour un trou). Ceci permet d’éviter une désynchronisation entre le défilement du disque et la lecture des données. En effet, sur une longue séquence de 0, une faible erreur dans le contrôle de la vitesse de rotation peut provoquer une erreur de lecture. Par exemple, sur une séquence de 1000 zéros consécutifs, une erreur de seulement 0,1% provoquerait la lecture de 999 ou 1001 bits au lieu de 1000. En limitant la longueur des séquences de zéro, on assure d’avoir une resynchronisation régulière (à chaque 1), autorisant un contrôle moins précis (et donc moins coûteux) de la vitesse de rotation : avec des séquences ne dépassant pas 10 zéros, il faut une erreur de plus de 5% pour avoir un bit en moins ou en plus.

Vitesse de lecture

Le CD étant initialement destiné au marché de l’audio, sa vitesse linéaire (la longueur de piste lue par le laser sur une période donnée) doit être constante. Chaque tour de piste étant plus long que le précédent, les premiers lecteurs de CD adaptaient donc leur vitesse de rotation en ralentissant au fil de l’avancement de la lecture. Ce mode est appelé CLV, pour Constant Linear Velocity.

Avec l’arrivée des usages informatiques, il est devenu utile d’augmenter la vitesse de lecture, et c’est ainsi que sont apparus des lecteurs 2x, 4x, 8x, etc. 1x correspond à 150 Ko/s et une vitesse de rotation de 500 RPM au centre du disque et 200 RPM à l’extérieur du disque.

Comme ces usages informatiques ne nécessitaient plus une vitesse linéaire constante, les lecteurs ont adopté une autre stratégie de lecture : le CAV, pour Constant Angular Velocity. Cette fois, la vitesse de rotation du disque est constante, ce qui permet de profiter au maximum des capacités mécaniques du lecteur, le débit s’accroissant alors à mesure que la lecture s’éloigne du centre. Ainsi, un lecteur fonctionnant à 5000 RPM lit à une vitesse de 10x au début du disque et 25x à la fin.

Courbe de vitesse CAV
Courbe de vitesse CAV
Courbe de vitesse CLV
Courbe de vitesse CLV

Il existe également des intermédiaires entre le CAV et le CLV : le Partial CAV et le Zoned CLV. Le premier tire son origine dans les limites de performances de certains contrôleurs : en début de lecture, le lecteur fonctionne en CAV, jusqu’à ce que le débit atteigne la limite du contrôleur, puis continue en CLV pour éviter une saturation. Pour un même débit maximal, le P-CAV est plus performant que le CAV, son débit moyen étant plus élevé (la vitesse maximale n’est pas atteinte que en fin de disque), mais nécessite une mécanique plus rapide.

Le second concerne surtout les graveurs. Il consiste à fonctionner en CLV, mais avec plusieurs sauts de vitesse le long du disque, qui correspondent à un retour à la vitesse angulaire maximale. Cette technique donnerait une meilleure qualité de gravure, en simplifiant l’adaptation de la puissance du laser (la puissance doit être adaptée à la vitesse linéaire, qui ne varie généralement que trois ou quatre fois au lieu de varier en continu) tout en offrant un meilleur débit moyen que le CLV, grâce aux retours réguliers à la vitesse angulaire maximale.

Courbe de vitesse P-CAV
Courbe de vitesse P-CAV
Courbe de vitesse Z-CLV
Courbe de vitesse Z-CLV

Les CD enregistrables

Initialement, les CD étaient des supports en lecture seule, les données étant intégrées à la galette de plastique durant la fabrication du disque. Quelques années plus tard sont arrivés les premiers CD enregistrables.

Sur ces disques, une fine couche de matière organique est déposée entre la couche de plastique et la couche réfléchissante. La couche plastique ne contient pas de données, mais n’est pas totalement vierge pour autant, puisqu’elle comporte une piste circulaire permettant de guider le laser pendant la lecture et l’écriture des données.
La couche organique est sensible à la lumière et peut être détruite en augmentant la puissance du laser. Le graveur peut ainsi créer des trous dans cette couche, ce qui modifie la quantité de lumière réfléchie.

Différents matériaux peuvent être utilisés (cyanine, phthalocyanine…) pour réaliser la couche organique, avec un fort impact sur le coût de production et sur la qualité des disques.

Les CD réenregistrables

Encore un peu plus tard sont apparus les CD réenregistrables (RW). C’est cette fois au niveau de la couche réflective que tout se joue. Celle-ci est constituée d’un alliage métallique (argent, indium, antimoine et tellure) qui est réfléchissant lorsqu’il adopte une structure polycristalline et non réfléchissant à l’état amorphe. À l’état vierge, l’alliage est en structure polycristalline. En le chauffant à haute température (plus de 500°C), le laser le fait fondre et il adopte alors une structure amorphe en refroidissant. Le laser peut ainsi créer sur la surface des points moins réfléchissants.

Un chauffage à « basse » température (200°C) permet ensuite à l’alliage de retrouver sa structure polycrystalline, ce qui efface le contenu du CD-RW, qui peut alors être à nouveau enregistré.

Les successeurs du CD

Structures de divers disques optiques
Structures de divers disques optiques

Le DVD

Fils spirituel du CD, le DVD en reprend tous les principes, mais en les améliorant. En utilisant un laser de longueur d’onde un peu plus courte (650 nm au lieu de 780 nm, ce qui donne une couleur orange), le DVD permet d’augmenter la densité des données. La longueur d’onde réduite, couplée à une lentille plus convergente permet en effet de réduire la taille du spot laser sur la surface du disque : le diamètre du spot est égal au rapport de la longueur d’onde et de l’ouverture numérique de la lentille, une valeur qui caractérise sa capacité à focaliser les rayons en un point (elle passe de 0,45 sur les lentilles CD à 0,6 sur les lentilles DVD). La taille du spot passe ainsi de 1,7 µm à 1,1µm. Par ailleurs, les marges ont été réduites, le spot du laser qui lit une piste frôle les deux pistes voisines, alors qu’une certaine distance était maintenue dans le cas du CD.

Ainsi, l’espace entre les pistes passe de 1,6 µm à 740 nm, la largeur des trous de 600 à 320 nm et leur longueur minimale de 800 à 400nm.

En plus de cette augmentation de densité, la couche de données est déplacée au milieu du disque, au lieu d’être quasiment au niveau de la surface supérieur, ce qui permet la réalisation de disques double face (et donc double capacité), mais aussi de disques mixtes avec une couche DVD semi-transparente au centre et une couche CD sur le dessus. Cette possibilité a toutefois été peu exploitée.

Enfin, une couche intermédiaire peut être ajoutée entre la surface extérieure et la couche centrale. Elle est réalisée dans un matériau semi-réfléchissant et le choix de la couche à lire se fait en jouant sur la focalisation du laser. L’utilisation de deux couches rend toutefois la lecture un peu moins précise, ce qui est compensé en augmentant légèrement la taille des trous, qui passent à un minimum de 440 nm de long. Les deux couches offrent donc un peu moins que le double de la capacité d’une couche (8,5 Go au lieu de 9,4 Go).

Le Blu-ray

On ne change pas une méthode qui gagne ! Le Blu-ray reprend donc le principe du CD, y ajoute les améliorations du DVD (multi-faces et multi-couches) tout en réduisant encore un peu plus la taille des éléments. La longueur d’onde du faisceau passe à 405 nm (bleu, d’où le nom), l’écart entre les pistes passe à 320 nm et la largeur des trous tombe à 130 nm pour une longueur minimale de 150 nm. Pour arriver à ce résultat, en plus de la diminution de la longueur d’onde, une seconde lentille a dû être ajoutée, pour atteindre une ouverture de 0,85 (et donc un spot de 480 nm). C’est l’une des raisons du surcoût des lecteurs BD par rapports aux lecteurs HD-DVD. Ce format rapidement abandonné utilisait en effet lui aussi un laser de 405 nm, mais avec une densité de données plus faible (trous de 200 nm de long et de large, pistes séparées de 400 nm), qui permet de se contenter d’une seule lentille, avec une ouverture de 0,65 (spot de 620 nm).

La couche de données du Blu-ray est située quasiment au niveau de la surface inférieure du disque, ce qui aurait pu coûter cher au BD. En effet, avoir la couche si près de la surface inférieure rend les disques particulièrement sensibles aux rayures. Initialement, il était donc prévu que les disques soient installés dans une cartouche protectrice (à la manière d’une disquette).

Graveur de Blu-ray BDZ-S77
Le Blu-ray, ça aurait pu être ça, si le disque avait été protégé par une cartouche

Cette solution aurait été pratique pour la manipulation des disques BD (à condition qu’ils soient vendus avec la cartouche et n’aient jamais à en sortir), mais pas pour la rétrocompatibilité : pour lire un CD ou un DVD dans un lecteur de BD, il aurait au préalable fallu le glisser dans une cartouche…

C’est finalement TDK qui nous a sauvés de la cartouche en 2005, en annonçant le Durabis, un polymère suffisamment résistant pour protéger les BD des rayures. D’autres constructeurs ont depuis développé leurs propres solutions, et certains l’utilisent désormais aussi pour les autres types de disques optiques, même s’ils sont moins sensibles aux rayures.

Là encore, le déplacement de la couche de données permet de réaliser des disques mixtes BD/DVD, mais cette possibilité n’a quasiment pas été exploitée commercialement.

Et après ?

Fortement bousculés par la dématérialisation et par la forte baisse de prix des disques durs et mémoires flash, les supports optiques sont aujourd’hui en net déclin, et devraient petit à petit être abandonnés par le grand public. Un nombre croissant d’ordinateurs est d’ailleurs dépourvu de lecteur optique.

Mais ce n’est pas pour autant que tous les acteurs du secteur baissent les bras. Certains pensent en effet que le disque optique aura encore longtemps sa place dans certaines niches de marché, et notamment pour la sauvegarde et l’archivage de données.

Dans ce contexte, il présente en effet de multiples avantages, comme sa longue durée de vie (avec des supports de qualité et un stockage adapté, pas avec les galettes premiers prix du supermarché du coin, laissés sans boîte sur l’appui de fenêtre…) et leur manipulation facile, mais aussi et surtout, leur résistance aux champs électromagnétiques (le disque optique est l’un des rares supports de stockage qui résisterait à une attaque par impulsion électromagnétique) et la possibilité de s’assurer d’un fonctionnement en lecture seule (évitant tout effacement accidentel d’une sauvegarde durant sa restauration…).

Ainsi, les recherches continuent pour améliorer les disques optiques, toujours en suivant les mêmes axes d’amélioration : augmentation de la densité surfacique et augmentation du nombre de couches. Par exemple, l’Archival Disc, présenté par Sony et Panasonic il y a quelques jours, passe à un espacement de 225 nm entre les pistes et des trous d’une longueur minimale de 80 nm de long, ce qui permet d’atteindre 50 Go par couche. Ce format permet de plus d’utiliser jusqu’à six couches (trois par face), pour une capacité maximale de 300 Go.

Et les constructeurs ne comptent pas s’arrêter là, avec déjà le projet d’augmenter la capacité de l’AD jusqu’à 500 Go en diminuant encore la longueur des trous puis jusqu’à 1 To en utilisant un encodage multi-niveaux : au lieu de n’avoir que deux niveaux de réflexion différents (« trou » et « bosse »), les disques de 1 To utiliseront plusieurs niveaux de réflexion, permettant d’encoder plusieurs bits à la fois (sur le même principe des mémoires flash MLC, qui stockent plusieurs bits par cellule en mesurant plus finement le niveau de charge pour autoriser plus de valeurs).

Enregistrement optique multi-niveaux
Un schéma expliquant le multi-level

L’étape suivante sera le disque optique holographique, où les données seront « taillées dans la masse » plutôt que simplement sur une surface, avec à la clé des capacités de stockage qui atteignent celles des plus gros disques durs d’aujourd’hui. Le HVD (Holographic Versatile Disc), qui est le plus avancé industriellement, avec le soutien de nombreux constructeurs, a par exemple atteint une capacité de 6 To sur un disque à peine plus gros qu’un disque optique classique (12 cm de diamètre, comme un CD, mais 3,5 mm d’épaisseur au lieu de 1,2). Il y a toutefois très peu de chances de voir un jour ce type de disques débarquer chez le grand public.

Article publié initialement sur PCWorld

4 réflexions sur « La Question Technique 6 : CD, DVD, Blu-ray, RW… comment ça marche les supports optiques ? »

  1. jolies explications, meme si je n’utilise plus d’optique depuis un bail, on retrouve beaucoup de protocoles de transmission, et quelques chiffres qui rappellent ou on en est technologiquement.
    Merci!

  2. Le truc c’est qu’on s’est fait avoir le DVD (10 ans de durée de vie et on nous dit à nouveau de tout racheter).
    Si les magasin comme la fnac se mettaient à proposer de venir récupérer un logiciel/jeux acheté avec sa clé USB (si on ne peut pas le DL) cela signerait définitivement la mort du support optique. (or console)

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.